Raisin bleu

Peu après le son de quatre heures, me voici tirée du lit pour aller cueillir des raisins bleus voilés de rosée matinale. À ce moment, j’ignore encore que je décou - vrirai des raisins de toutes tailles formant un vaste coloris, mais surtout une gamme de parfums tous plus surprenants les uns que les autres.

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Le raisin est un fruit très ancien qui compte parmi les plus répandus sur la planète. Son goût vif et ju - teux ainsi que sa douce acidité couplée d’une saveur agréablement sucrée savent charmer depuis des mil - liers d’années. On le consomme tel quel, cuit, séché ou sous forme de jus, de vin, de gelée ou de confiture. On le retrouve aussi souvent incorporé aux salades de fruits, tartes et autres pâtisseries. Couramment uti - lisé en cuisine marocaine, le fruit de la vigne ajoute une agréable touche sucrée et caramélisée à sauces, farces, caris et couscous. On peut également congeler des raisins frais pour les utiliser comme glaçons dans un cocktail ou pour donner un petit goût de bonbon à un smoothie.

Cueillette matinale

Mon amie Mia et moi arrivons au vignoble Coteau Saint-Paul, à Saint-Paul-d’Abbotsford en Montérégie, peu après le lever du soleil. Situé à flanc de montagne, sur le versant sud du mont Yamaska, le vignoble rayonne d’une beauté paisible et nous sommes plus qu’heureuses d’avoir le site à nous seules pour quelque temps. Le jeune propriétaire nous offre une visite des lieux, parlant de toutes les variétés de pommes et de raisins en cueillette libre, mais aussi des innombrables vignes réservées à la production vinicole. Après notre tournée, nous ne pouvons plus attendre de goûter.

Pourquoi le raisin bleu? Les variétés bleues se démarquent par leur couleur marine profond et leur acidité présente, mais douce. Très populaires en Ontario, elles sont de plus en plus fréquentes dans les vignobles et marchés québécois. Comme leur peau s’enlève facilement, les raisins bleus sont fréquemment utilisés dans la préparation de jus et de gelées, mais aussi de vins. Certaines personnes les privilégient également pour l’intensité de leur couleur, qui dénote un fort pouvoir antioxydant. Aujourd’hui, nous nous concentrons sur le Montréal Blue, une vigne produisant d’immenses grappes de baies bleues sans pépin parfaitement rondes. Nous découvrons un raisin de table ferme, sucré et goûteux avec des arômes de mûre et de cassis. Ensuite, nous visitons les parties du vignoble réservées à la production de vins et de produits du terroir.

Nous avons la chance de goûter à une myriade d’autres variétés bleutées, comme le Sabrevois (beaucoup utilisé pour la production de vin rouge du vignoble), le Radisson, le Marquette (un plus petit raisin d’un riche bleu violacé), le Magenta et le Trollhaugen.

Bien que le bleu soit en vedette, impossible de résister à la tentation de goûter aux grappes de toutes les couleurs. Nous craquons pour le Somerset, un raisin rouge qui goûte étrangement la barbe à papa - avec une saveur aussi bluffante, pas étonnant qu’il s’agisse de l’un des cépages les plus populaires des dernières années. Nous ouvrons les yeux grands en faisant craquer un Kay Gray sous nos dents; le petit raisin blanc a un goût surprenant qui rappelle celui des Mr. Freeze mauves. Il y a même l’aromatique Muscat de Swenson et le savoureux Brianna, raisin vert et juteux à l’agréable goût tropical. Je redécouvre le raisin, et je ne peux plus m’arrêter.

Dîner sur le fly

Nous ne voyons pas le temps passer, mais le bourdonnement de notre estomac nous rappelle à l’ordre peu après le coup de midi. Nous trouvons un petit coin tranquille devant un hangar et nous assoyons près de l’entrée pour préparer notre repas. Au menu : une salade de raisins bleus au riz sauvage et fenouil.

Plutôt que d’essayer de démêler toutes les magnifiques billes bleu minuit dans notre panier, nous décidons de préparer notre recette toutes variétés confondues. Nous séparons délicatement les baies bleu indigo de leurs tiges, les doigts vite tachés de mauve. Nous profitons de ce petit moment de répit pour nous raconter nos vies et jaser d’actualité et d’environnement (...et peut-être un peu de gars aussi, je l’avoue).

Tandis que Mia masse patiemment l’oignon rouge, je m’attaque aux délicates fines herbes du jardin. Quelques instants plus tard, nous sommes prêtes à goûter au fruit de notre récolte.

J’avais déjà ajouté une poignée de raisins rouges à une salade de chou frisé au tahini pour lui donner une petite touche sucrée et craquante, mais je n’aurais pas pensé faire de ce fruit la vedette d’un plat salé. Pourtant, chaque bouchée me confirme que je manque quelque chose depuis trop longtemps. Le mélange de textures et de saveurs est délicieusement surprenant. Raisins juteux, fenouil et fines herbes en font une salade des plus rafraîchissantes, sans parler des sucres qui nous redonnent rapidement de l’énergie après des heures de marche, de cueillette et de découverte.

Je ne peux imaginer une meilleure manière de clore une aussi belle matinée que de déguster un plat frais et savoureux tout en apprenant à mieux connaître une amie. Nous nous éloignons du vignoble au son des bouteilles de vin qui se cognent doucement dans le coffre, la pluie se mettant doucement à tomber tandis que nous gagnons la route. Nous tirons la langue en riant, car elle est toute mauve!

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